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Le générique


Vengeance !

 

 

 Casting

Affiche originale de Vengeance !Année : 1970 (mai)
Durée :  98 minutes
Titre alternatif : Kung Fu Vengeance

Genre : arts martiaux
Catégorie IIB
Réalisateur : Chang Cheh
Producteur : Runme Shaw
Scénaristes : 
Ni Kuang,
Chang Cheh
Chorégraphes : Tang Chia, Yuan Hsiang Jin
Monteur :
Chiang Hsing Loong
Directeur artistique : Johnson
Tsao
Photo : Kung Mo To

Musique: Wang Fu Ling

Interprètes :
David Chiang, Ti Lung, Wong Ping, Cheng Fang, Ku Feng, Wong Chung, Cliff Lok, Hsu Hsia, Yeung Chi Hing, Wong Ching Ho, Cheng Lui, Chan Sing, Chen Kuan Tai, Cheng Hong Yip, Chuen Yuen, Lau Gong, Shum Lo, Wong Kwong Yue, Wong Ching Ho, Hung Lau, Kok Lee Yan
.
Apparitions spéciales : Yuen Cheung Yan, Yuen Woo Ping,
Yeung Wai, Fung Hak On, Sunny Yuen Shun-Yi.

 

 Histoire & Critiques

Histoire : Un acteur d'opéra chinois se rend compte que sa femme lui préfère un petit parrain. Furieux, il se rend chez lui, le menace à grands renforts d'arts martiaux et l'humilie. Mais son geste ne restera pas impuni : un piège lui est tendu et il meurt dans d'atroces souffrances. Un mystérieux homme arrive alors en ville et pose beaucoup trop de questions au goût de la pègre locale. C'est son frère, il est venu pour le venger...


Critique de David-Olivier : Vengeance ! est un des plus grands succès de la Shaw Brothers des années 70 (avec One Armed Boxer), un film très noir, pessimiste et à la mise en scène "claustrophobique" qui rapportera à Chang Cheh le prix de la mise en scène et à David Chiang le prix d'interprétation masculine au Asia-Pacific Film Festival de 1970. C'est une oeuvre dure, oppressante, aussi acérée qu'un couteau, véritable exercice de style qui ne s'embarrasse d'aucun scénario élaboré. Celui-ci suit simplement la trame d'un film policier américain de série B, jeu de massacre au cours duquel le héros remonte une organisation criminelle jusqu'à sa tête afin de la faire tomber. Il suffit de rajouter à ce point de départ la thématique favorite du cinéma de Hong Kong, la vengeance, et le scénario est ficelé ! Ce n'est donc pas de ce côté qu'il faudra chercher et trouver la richesse du film... Côté personnages, rien de révolutionnaire non plus. Les protagonistes sont monolithiques, enfermés dans les stéréotypes classiques de ce genre de production : bons, méchants, traîtres, puissants... Les femmes sont parfois dangereuses dans Vengeance !, déterminées toujours. C'est par leur faute que les deux frères seront séparés par la mort et seule la vengeance, prise en main par un homme, leur permettra de se retrouver de l'autre côté du miroir.
Bien que partageant la tête d'affiche avec David Chiang, Ti Lung n'apparaît qu'une vingtaine de minutes, le temps de nous démontrer quel grand artiste - martial - il est : de la danse qu'il effectue en plein opéra chinois aux joutes à poings nus contre une armée d'assaillants. Comme d'habitude chez Chang Cheh, le héros se doit de mourir torse nu, lentement et dans d'atroces souffrances (pour le coup d'une intensité gore rarement atteinte à l'époque...). Avant de rendre son dernier souffle, il aura eu le temps de régler leur compte à quelques dizaines de combattants, une hache plantée dans l'abdomen !


David Chiang, la mèche au vent dans son costume blanc (*) maculé de sang, reprend son rôle de héros ténébreux prenant la pose au détour d'une figure martiale bien sentie. Le spectateur est témoin de la construction d'un mythe, d'une figure qui, au final, frappera plus les esprits que celle de Ti Lung. Ce dernier, quant à lui, essaya de se diversifier un maximum en n'hésitant pas à revêtir le costume du méchant (Blood Brothers) ou à jouer les faibles (Empress Dowager et The Last Tempest). La différence ultime entre l'acteur et le cabot ? Les limites dramatiques de David Chiang apparaissent clairement au cours des scènes romantiques à l'occasion desquelles il a des difficultés à se placer et a étrangement l'air benêt. La castagne, oui, l'art dramatique, une autre fois !


Les chorégraphies sont très violentes et bien maîtrisées par l'éternel complice de Chang Cheh, Tong Gaai, cette fois-ci sans sa moitié Liu Chia-liang (on sait que le grand chorégraphe répugne à utiliser à outrance la violence dans les combats qu'il crée ; son absence du générique est peut-être due au désir du metteur en scène
de représenter cette violence de manières abondante et graphique). Chang Cheh découvrait à l'époque les techniques du Hung Fist et du Wing Chun, toutes deux appartenant à "l'école du Sud", et souhaitait les mettre en scène dans ses films (ce qu'il fit avec Vengeance !, mais aussi The Boxer From Shandong). L'utilisation d'inserts en noir er blanc, d'extraits d'opéra chinois (afin d'appuyer la mort des héros et le côté théâtral de leur chute, Chang Cheh dresse des parallèles avec des scènes d'opéra ; l'effet est particulièrement réussi dans la séquence qui voit Ti Lung se faire attaquer par une meute assoiffée de sang) et de ralentis (**) donne une force brutale aux combats. Ces "expérimentations" d'alors seront reprises maintes et maintes fois dans les productions à venir.
On pourra noter dans la mise en scène un mélange de scènes d'extérieurs - toujours agréables - et d'intérieurs, avec une fascination pour les escaliers, lieux très théâtraux, cinégéniques et particulièrement appréciés des réalisateurs (Eisenstein, de Palma...) : descente aux enfers mais aussi élan pour porter l'estocade finale.

Vengeance ! peut être appréhendé comme une oeuvre de transition dans la carrière de Chang Cheh. Avec ce film, il s'éloigne quelque peu de son genre de prédilection, le film de sabres, qui l'a rendu célèbre au cours des années 60 (même si il réalisera encore de nombreux films d'arts martiaux et wu xia-pian) et s'amuse à mélanger les genres : arts martiaux "fist and leg", armes blanches, pistolets, fusils (les armes à feu étaient alors complètement bannies des films d'arts martiaux : elles représentaient le déclin occidental, la machine prenant l'ascendant sur l'humain)... tout y passe ! Mention spéciale à la présence incongrue, presque anachronique (nous sommes en 1925 !), d'un tueur à gages muni d'un fusil à lunette. Chang Cheh ouvrait alors une brèche dans laquelle s'engouffra un certain Bruce Lee avec le succès qu'on connaît... Un de ses regrets a été que la vague Bruce Lee a tout balayé sur son passage et a forcé le cinéma hongkongais à se cantonner des années durant dans le style kung-fu. Vengeance ! n'était pour lui qu'une étape vers un but qu'atteindra ironiquement un de ses élèves, John Woo, la définition d'un nouveau genre, le "gunplay".

En conclusion, il faut voir en Vengeance ! un pur film esthétique où l'histoire et les personnages restent secondaires. C'est peut être sa force, mais c'est aussi sa limite, l'empêchant d'atteindre ainsi le rang de chef d'œuvre.

 

(*) La couleur blanche est, dans l'opéra classique chinois, la couleur du héros. C'est un costume d'étudiant que David Chiang porte dans Vengeance ! (un costume "Zhongshan"), habit dont s'inspirera Bruce Lee dans Fist Of Fury.

(**) Dans un entretien publié dans l'excellent livre "The Making Of Martial Arts Movies - As Told By Filmmakers And Stars" (Hong Kong : Provisional Urban Council, 1999 - Hong Kong Film Archive), Chang Cheh raconte que c'est à l'occasion de The Magnificent Trio (1966) qu'il a utilisé pour la première fois le ralenti, mais que c'est suite à la vision de Bonnie And Clyde (id., Arthur Penn, 1967) et The Wild Bunch (La Horde Sauvage, Sam Peckinpah, 1969) qu'il a perfectionné sa technique et a pu l'utiliser à un niveau qu'il juge satisfaisant dans Vengeance !.



 

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