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Les acteurs

 


 Damian Lau 

portrait & filmo

Portrait

Dans un univers parfait, le simple murmure de ce nom suffirait à mettre en transe toute une salle de cinéma. Mais non, l'écran reste maladroitement squatté par d'innombrables messieurs Acharisme. Damian Lau n'est pas de ceux-là. Aucunement. Il appartient aux grands. Pourquoi ? Parce que cet homme, à lui seul, fait comprendre le sens même de la notion d'émotion au cinéma. Il n'est heureusement pas le seul, mais ici c'est son portrait.

Le panel d'acteurs de films de sabres est large. Damian Lau n'aurait donc pu être qu'un ersatz ("David Chiangien", "Wang Yuien"...) parmi tant d'autres, un Wei Pai de plus dans le désert. Il n'est pas non plus de ceux-là. Cela est-il dû à la coïncidence de son arrivée dans le milieu avec celle de la Nouvelle Vague ? Peut-être.... Tout simplement à ses talents de comédien ? Indéniablement....

Il partage, bien sûr, avec nombre de ses confrères du wu xia pian la classe chevaleresque, un charme certain (jusqu'au léger problème de lèvres avec Tsui Siu-Kong), ainsi qu'une habileté dans les arts martiaux. L'apanage du parfait petit bretteur en somme. Mais viennent s'y mêler deux caractéristiques confirmant sa "non-ersatz attitude" : fragilité et gravité.

Last Hurrah For ChivalryFragilité physique d'abord, de par sa stature fluette peu commune dans le monde des épéistes de cinéma (il n'a rien d'un Ti Lung ou d'un Chen Kuen-Tai niveau corpulence), aspect renforcé par sa relative candeur (naturelle) faciale. Gravité du regard ensuite, d'une grande expressivité soit dit en passant, celle-ci s'opposant à l'impression de candeur et ne pouvant qu'apporter profondeur et majesté à ses rôles (rien de tel qu'un personnage intérieurement tourmenté mais ne le montrant que par bribes, légères d'abord, puis qui s'amplifient). Damian Lau, un acteur porté par une mélancolie certaine, un acteur définitivement "wooien" en somme.

Pour vérifier cela, une date : 1978. Un titre : Last Hurrah For Chivalry de John Woo. Dans la peau d'un mercenaire désabusé et alcoolique, génie du fourreau doté d'une perception aiguë de l'amitié, Damian Lau crève l'écran, éclipsant le pourtant crédible rôle principal, Wei Pai. Autant à l'aise dans les scènes de soûleries et autres combats, teintées, comme il se doit, de fraternité et d'amitié franche (dernier rempart à la crevardise ambiante de ce monde, et encore !) que dans l'introspection, où il se montre plus grave, sévère (les passages avec la prostituée), y exposant un état d'esprit cynique, dur, vis à vis de son existence d'artiste martial. Un flot d'émotions fortes, un "Mark Lee" avant l'heure.

Duel To The Death1983 dit avènement de Ching Siu-Tung et qui dit avènement de Ching Siu-Tung sous-entend, bien-sûr, le très célèbre Duel to the Death. Damian Lau partage l'affiche du chef-d’œuvre avec le non moins talentueux Norman Tsui Siu-Kong, la grâce céleste de l'un se mariant parfaitement à la virilité Samouraï de l'autre. Il y incarne un jeune expert en arts martiaux chinois, portant sur sa condition de chevalier un regard amer et sévère (sa fameuse gravité). Personnage qui ne peut que rappeler dans l'esprit son précédent rôle chez John Woo. Personnage joué avec toujours autant de sensibilité et de sentiments par l'acteur. Il doit avoir un don.

The Swordsman (Tv)Cette même année, il tourne dans une autre bombe cinématographique : Zu, les guerriers de la montagne magique. Cependant, Tsui Hark ne me parait pas être un metteur en scène en réelle adéquation avec le style très personnel de Damian Lau. Ses personnages masculins n'existant essentiellement qu'au travers de ce qu'ils sont vraiment, des hommes créés et voulus comme tels par le réalisateur, ne laissant donc aux acteurs que peu de champ libre émotionnellement parlant. Damian Lau y est donc très bon, plaisant comme à son habitude (comédie, drame, il sait tout interpréter), mais l'âme n'y est que peu exploitée.

Icebreaker (Tv)1984-1987 correspond à une période cinématographique creuse pour l'homme, sans doute liée à l'abandon, pour un temps, des films de sabres par l'industrie hongkongaise. Qu'importe ! Damian Lau commençe sa carrière à la télévision et la poursuit donc comme telle. Il a, en effet, depuis 1976, tourné dans une quarantaine de séries TV, en costumes pour la majorité (Yesterday's Glitter, Poetic Sword, The Swordsman, etc...) et contemporaines pour d'autres (Feng Yun, Interpol, Ice Breakers, etc...). N'en ayant vu aucune, je ne peux juger de ses performances (au passage, "applause" et respect au site Damien Lau's Profile) .

School On FireRingo Lam perturbera cette accalmie en l'employant comme professeur d'école dans son School On Fire de 1988. Le film l'unit pour la première et unique fois à Lam Ching-ying, le magnifique. La rencontre de ces deux grands ne pouvant me faire dire qu'une chose : "C'est beau".

Après un rôle principal dans The Story of my Son de Johnny To (un père de famille déchu, endetté, veuf, bref désabusé comme il lui faut), Damian Lau participe dès 1992 à quatre comédies-costumes estampillées Wong Jing (les Chow Sing-Chiesques Royal Tramp 1 et 2, suivis de Holy Weapon un an plus tard, pour finir en 1994 avec The New Legend of Shaolin - La Légende du Dragon Rouge). Dans un autre genre totalement différent, My Father is a Hero en 1995 clôturera cette association. Limitée au second rôle ou à de simples apparitons, sa prHeroic 
Trioésence dans un film ne peut qu'émouvoir, ravir son amateur, Damian Lau restant toujours Damian Lau, le classieux, l'acteur que l'on a toujours envie de voir, même caché derrière un store. En 1993, Heroic Trio et sa suite Executioners de Johnny To et Ching Siu-Tung suivront ce même processus de guest. Cette même année le verra incarner le méchant du workshopien Magic Crane de Benny Chan, où il retrouve son vieux comparse Norman Tsui Siu-Kong. Un présage ?

What Price Survival1994 voit, en effet, naître l'un des plus beau et vibrant hommage à tout cet ancien pan du cinéma hongkongais qu'est le film de sabres. Son nom : What Price Survival (en français Frères d'armes). Son réalisateur : Daniel Lee. A sa tête (sans oublier les non-affiliés que sont les excellents Jack Kao et Charlie Young), trois icônes du genre : David Chiang, Norman Tsui-Siu Kong et Damian Lau. Le résultat se montre beau et grand, les trois acteurs n'ayant en aucun cas perdu de leur intensité expressive, de leur verve et de leur fabuleux et fameux talent. Damian Lau replonge brillamment dans son personnage d'épéiste déchiré, tourmenté, qui n'a plus rien à attendre de la vie. La page wu xia peut dès lors dignement se refermer pour le comédien, au cinéma tout du moins.

Il tourne par la suite, en tant que second rôle, dans trois films de 1996 (Ah Kam d'Ann Hui, First Option de Gordon Chan et Best of the Best aka Final Option 2) d'Andrew Lau, achevant (définitivement ?) sa carrière cinématographique l'année suivante sur le Lifeline de Johnny To (son cinquième To depuis The Enigmatic Case en 1980).

Elvis Tsui et Damian Lau dans The Monk (série TV de 
2000)Ses différents travaux le prouvent, via la télévision ou le cinéma, l'acteur s'illustra essentiellement dans le wu xia pian. Mais plus qu'un chevalier de studio, Damian Lau m'apparaît comme un véritable chevalier dans l'âme. En effet, comment réussir à faire transparaître autant d'émotion et de sincérité, sans être, et cela de manière intime, spirituellement lié à ce genre de héros ? En étant un acteur merveilleux peut-être... Damian Lau l'est indéniablement, mais cela, je pense, ne suffirait pas. Cette justesse dans le regard et autres de ses expressions ne pouvant être qu'innée, naturelle. Un sourire comme le sien dans le final de Last Hurrah for Chivalry ne s'invente pas et ne s'apprendra jamais.

 

Pablo (mars 2003)


 Filmographie  (les films en caractères gras sont ceux sortis en France)
Dragon Sabre And Heaven Sword (TVB)
Lu Hsiao Fury (1976)
Last Hurrah for Chivalry (1979)
Enigmatic Case, The (1980)
Duel to the Death (1983)
Zu: The Warriors from the Magic Mountain (1983)
Profile in Anger (1984)
School on Fire (1988)
Story of My Son, The (1990)
Inspector Pink Dragon (1991)
Shanghai Heroic Story (1992)
Royal Tramp (1992)
Royal Tramp II (1992)
Heroic Trio, The (1993)
Holy Weapon (1993)
Executioners (1993)
Murder (1993)
Magic Crane, The (1993)
New Legend of Shaolin, The (1994)
What Price Survival (1994)
Tian Di (1994)
My Father is a Hero (1995)
First Option (1996)
Best of the Best (1996)
Ah Kam (1996)
Lifeline (1997)

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