Cinq fois champion national
de Wu Shu en Chine, Jet Li, est devenu, en quelques années,
la star numéro-un bis du cinéma en Asie (l'autre numéro-un
étant l'indétrônable Jackie
Chan). Idolâtré par près d'un milliard de personnes,
Jet Li, tente aujourd'hui une percée dans le cinéma Américain
en endossant le costume sombre du bad guy dans Lethal
Weapon 4. Retour sur un phénomène en passe de conquérir
l'Amérique et, pourquoi pas... le monde entier.
Né en 1963 à Pékin, Lee Lianje
commença le wushu dès l'âge de 11 ans. Ce jeune prodige des arts
martiaux accumula les titres nationaux pendant plusieurs années
consécutives, et c'est logiquement qu'on pensa à lui pour interpréter
le premier rôle dans Shaolin Temple (1) (film de Chine
Populaire) et ses deux suites que sont Kids from Shaolin et Martial
Arts from Shaolin (1). C'est avec son deuxième film que Lee
Lianje devint "Jet Li", superstar de toute l'Asie.
Exilé à Hong Kong, Jet lee va
de succès en succès et réalisera même un film : Born to
Defend (1) (sa seule mise en scène à ce jour). Cependant,
des problèmes avec les Triades (la mafia chinoise) qui abattent son
manager vont l'obliger à s'enfuir aux Etats-Unis. C'est d'ailleurs
là qu'il va jouer dans The Master de Tsui
Hark. Loin d'être un chef d'oeuvre, ce petit film nous permet
de revoir Yuen Wah (une des plus belles méchantes sales tronches du
cinéma hong kongais qui joue ici le rôle du gentil vieux maître
auquel son meilleur disciple va porter secours ...émouvant non?)
Mais surtout, il faut retenir la rencontre du génial réalisateur Tsui
Hark qui va exploiter à fond les qualités exceptionnelles
d'artiste martial de Jet Li.
C'est dans ces films que ses
fabuleux dons explosent. De ce fait , Once Upon a Time in
China marque le début de sa deuxième carrière. En relançant
La mode des films d'époque (les Wu Xia Pian) avec un nouveau style
de combats alliant la dure réalité et les acrobaties, Tsui
Hark renouvelle complètement le genre.
Ainsi, le personnage de Wong Fei
Hong (qui a réellement existé) est revu de manière exponentielle
par rapport aux anciennes séries interprétées par l'acteur
mythique Kwan Tak Hin. La photo est formidablement soignée (le ton
ocre qui prédomine dans toute la saga donne une chaleur et une
intensité dans l'âpreté de l'action), la caméra bouge énormément
et les plans défilent mettant de ce fait en valeur la virtuosité
des combats (imaginés et dirigés par Yuen
Woo Ping). D'ailleurs, c'est tellement puissant que le réalisateur
est obligé d'user de beaucoup de ralentis pour souligner
l'incroyable qualité des chorégraphies. C'est surtout visible dans
le deuxième chapitre (qui pour moi est le meilleur des cinq). Il ne
faut pas rater la confrontation entre Wong Fei Hong et le grand prêtre
de la secte du Lotus Blanc. Dans la grande tradition du cirque de Pékin,
leur duel a lieu au sommet de plusieurs tables branlantes empilées
les unes sur les autres : c'est vertigineux !!!
On peut retrouver le même type
d'exploit dans le final du premier volet où les deux adversaires
s'affrontent sur un enchevêtrement de longues échelles de bois à
l'équilibre incertain. Bien évidemment, dans les deux cas,
l'utilisation de câbles est indispensable, mais à aucun moment on
arrive à les voir ou même à les deviner. Cette alternance de scènes
complètement ahurissantes avec un kung-fu assez réaliste donne un
rythme tout à fait époustouflant !
Le succès est immense auprès du
public asiatique et bien évidemment les copies sont légion. Des
plus douteuses comme ce Once Upon A Time A Hero in China,
mais d'autres comme Last Hero in China / Claws of Steel
(1) sont d'excellentes surprises. Même s'il est réalisé par le
fantasque Wong Jing
(connu en France pour avoir commis le drolatique Niki Larson...),
ce film réserve de formidables combats. Il faut dire aussi que le rôle
de Wong Fei Hong est à nouveau interprété par l'incontournable
Jet Li et qu'il se surpasse encore dans une chorégraphie signée
une fois de plus Yuen Woo
Ping. Toujours très à son aise, notre héros national ,
confortablement assis sur une chaise, riposte aux assauts déchainés
d'un prisonnier. Dans les souterrains secrets d'un temple, un prêtre
kidnappeur de belles jeunes filles et lui confrontent les différentes
techniques apprises à Shaolin. De cette rencontre explosive
jaillissent des coups et des parades à l'invention débordante : ça
vole, ça se rend invisible derrière une cape, ça casse du bois
... bref c'est extrêmement jouissif ! Bien sûr, Wong
Jing est moins sérieux que Tsui
Hark, il remplit son film d'un certain humour qui est ici pas déplaisant
du tout. Bref, il vaut largement le déplacement.
Délaissant
le rôle pendant plusieurs années, Jet Lee retrouve son personnage
fétiche dans Once Upon a Time in China and America / Dr
Wong en Amérique (1). Wong Fei Hong quitte ici la Chine impériale
pour aller au Farwest y retrouver les cowboys et les indiens.
Dans tous ces films de haute
voltige, il faut être très câblé. Mais en ce qui concerne les câbles,
nul autre que Ching Siu-tung
(le formidable réalisateur des Histoires de Fantômes Chinois)
ne les utilise avec autant de brio. Quand on découvre pour la première
fois les trois Swordsman, on est estomaqué par la rapidité
de l'action, mais surtout par les prouesses inimaginables des
combattant(e)s. Ainsi, on n'hésite pas à couper un cheval en deux
de bas en haut, des ninjas se déplacent sur d'immenses frisbees acérés,
on se bat soit à coup de bateau (si si !)soit avec un pan entier de
terre arraché du sol ! Bien sûr, les combats aériens à la "DBZ"
se succèdent à un tempo d'enfer.
Tout dans Swordsman est
extrémiste : tant la frénésie de l'action que la beauté des
actrices (mais qui s'en plaindrait ?). Dommage que l'histoire soit
assez confuse (pour un occidental) et que Jet Lee n'apparaisse que
dans le deuxième volet de la trilogie.
Moins compliqués sont les deux Fong
Sai Yuk. Alternant la comédie (jouant principalement sur
des quiproquos) et les morceaux d'anthologie, ils sont à voir impérativement
! Vous serez sidéré par les exploits de cet autre héros national
quand vous le verrez combattre sur les épaules des badauds, sous
les planches d'un échafaud, au sommet d'une tour de bambous...Il
est tellement invincible qu'il se permet même de croiser le fer
contre plusieurs dizaines de sabreurs un bandeau sur les yeux (pour
ne pas voir le sang couler). On admira sa dextérité pour le
maniement du sabre : elle n'a rien à envier à celle d'Itto Ogami
de l'excellente saga japonaise Baby Cart (2).
Tous ces succés au box
office ont néanmoins un petit défaut : ils cantonnent
Jet Lee aux films en costumes. Hélas tous ces petits chefs-d'oeuvre
(excepté le décevant Kung Fu Cult Master / Evil
Cult ) sont trop " chinois ", et ont
donc peu de chance de toucher un public au goût très américanisé.
Ainsi, il continuera encore dans cette voie avec deux
autres petits bijoux que sont New Legend of Shaolin
/ La Légende du Dragon Rouge et Tai Chi
Master. Dans ce dernier, c'est l'occasion de retrouver
Jet Li avec Michelle Yeoh
(exilée aux USA et que l'on a pu admirer dernièrement
dans Police Story 3) dans un duo de chocs. Ce film
est une petite bombe à lui tout seul : ce n'est que combats
à un contre cent, de blessés résistant à plusieurs dizaines
de flèches plantées dans le corps, de supers guerriers
n'hésitant pas à envoyer ses propres soldats comme de
vulgaires projectiles... L'action (encore dirigée par
le génial Yuen
Woo Ping (vraiment, il est partout !)) est donc une
fois de plus rondement bien menée, avec en plus une formidable
musique (je conseille vivement la bande originale disponible
chez MUSICA dans le 13° à Paris).
1994 : année du changement
pour notre acteur préféré, car c'est à ce moment qu'il
décide de retrouver les films d'action de son époque.
C'est avec le succès planétaire de Bodyguard que
Jet Li va tenter d'imiter Kevin Costner avec un médiocre
Bodyguard from Beijing réalisé par le néanmoins
talentueux Corey
Yuen. Hélas, même s'il dépasse son modèle au niveau
de l'action (surtout pendant le final), il n'en reste
pas moins une petite série B. Nettement supérieurs sont
My Father is a Hero et surtout High Risk.
Les morceaux d'anthologie y pullulent ! Dans le premier,
on y voit même Jet Lee s'essayer aux gunfights comme ce
bon vieux Chow Yun Fat et
quand ce policier infiltré dans un gang voit son propre
fils kidnappé, il se déchaîne littéralement (et ça fait
mal pour les malheureux gangsters qui en prennent plein
la poire dans le dernier quart d'heure). En compagnie
de son fils (interprété par Tse Miu, un autre prodige
des arts martiaux âgé d'une dizaine d'années seulement
!) ils maltraitent leurs adversaires à coups de yoyo humain
(le jeune garçon jouant bien sûr le rôle du yoyo de la
mort !). Cette action " débridée " plait à nouveau
au public qui en redemande sans cesse d'avantage. C'est
ce que va encore donner Corey
Yuen en coréalisant le détonant High Risk.
Jet Li y joue une fois de plus le
rôle d'un super-flic qui cette fois ci est aux prises avec un très
dangereux terroriste responsable de la mort de sa famille. A la manière
de Piège de Cristal dans la deuxième partie, ce film veut
jouer dans la cour des grands blockbusters des majors américaines.
En restant au niveau de Hong Kong, il y réussit parfaitement.
Ainsi, on n'a pas lésiné sur les décors et les effets
pyrotechniques, et comme son modèle hollywoodien, on a tout fait péter
! A l'image de son hélicoptère traversant l'étage entier où sont
retenus les otages, décapitant quelques terroristes et dévastant
tout sur son passage, la production veut nous en mettre plein les
yeux et elle atteint son but.
1996, pour le nouvel an chinois
(où sortent les grosses productions), Jet Li décide de rejouer
avec l'un des plus grands réalisateurs de la colonie : Ching
Siu Tung. Dans Doctor Waï in the Scripture with no Words
(1), il campe deux personnages : un écrivain contemporain et son héros
le " Roi de l'Aventure ", vivant dans les années 40.
Largement inspiré d'Indiana Jones, le film a néanmoins du mal à démarrer.
Il faut attendre la 2° partie pour que tout s'accélère, enchaînant
les scènes extraordinaires : un combat gargantuesque contre d'énormes
sumotoris, une course-poursuite avec un train fou en plein milieu
des rues d'une ville.
Tout ce talent allait
tout doucement être remarqué à Hollywood. Débutant dans
un rôle de méchant dans l'Arme fatale IV (où il
meurt pour la première fois à l'écran !), le public international
l'a enfin découvert. Maintenant, le producteur Joel Silver
mise tout sur lui et lui offre le premier dans un remake
kung-fu sino-black de Roméo & Juliette (avec
des chorégraphie signées Corey
Yuen Kwai). Il a l'air très content du résultat et
espère avoir le même succès que pour Matrix...
c'est tout le mal qu'on lui espère. Malgré un certain
succès public, le film déçoit. Cependant, la bête de scène
éclate au grand jour et peut maintenant s'octroyer le
choix de ses réalisateurs et producteur. L'un d'entre
eux fut Luc Besson avec lequel Jet va monter Le Baiser
du Dragon : son premier film français ! Le nouveau
millénaire ne pouvait commencer aussi bien !!!! En tous
les cas, la belle Nina
Li Chi est tombée dans les bras de l'acteur. Elle
l'épousa en 1999 à San Francisco.
J-L (début
1997 - remanié en 2003)
A SUIVRE !
(1) éditée chez HK VIDEO
(2) édité chez PANDA FILM
(3) nous avons eu droit à l'inepte Dragon Kids sorti chez
GCTH et à Shaolin Kids chez TF1 VIDEO |