Lorsque
David Martinez (journaliste du défunt magazine HK – ORIENT
EXTREME CINEMA) lui demande lors d’une interview s’il considère
Hard Boiled
de John Woo comme son premier vrai rôle important, il lui
répond mots pour mots : « c’est de la merde »
et que le réalisateur était nul ! Tout le contraire de
ce que l’interrogateur pouvait attendre comme réponse. Voici
le portrait d’un acteur qui traverse le cinéma de l’ex-colonie
avec une incroyable faculté à se mouvoir dans tous les genres.
Il est l’un des rois de la Catégorie
3 hongkongaise, mais il peut jouer sur tous les registres,
passant du film d’auteur à la comédie en passant par le polar
ou le drame psychologique. Considéré par certains comme l’un
des meilleurs acteurs de l’ex-colonie, Anthony Wong ne passe
que rarement inaperçu dans ses films. Pour lui donner un équivalent
occidental, on pourrait citer l’immense et regretté Klaus
Kinski, toutes proportions gardées bien sûr
Les
débuts
Né
en 1961 d’une mère chinoise et d’un père anglais, il commence
par entrer à la télévision à l’âge de 21 ans, la chaîne ATV
où il y suit des cours d’art dramatique. Il s’inscrit ensuite
à une académie de théâtre pour y apprendre le métier d’acteur,
y interprétant le rôle de Cyrano ! Puis il entre à la
chaîne TVB où il commence à acquérir une certaine notoriété
dans des séries où il interprète la plupart du temps des rôles
de méchant de service.
Il
joue dans son premier film de cinéma en 1985, un drame signé
Angela Chan, My Name
Ain’t Suzie ? qu’il considère d’ailleurs comme l’un
de ses rôles favoris. Mais c’est au début des années 90 que
sa carrière d’acteur prend réellement son envol. Après des
rôles secondaires dans des films qui ne le sont pas moins,
il obtient son véritable premier rôle important dans Dancing
Bull du réalisateur de la Nouvelle-vague HK, Allen Fong.
Il enchaîne avec un polar signé Lee Lik-Chi, The
Set Up. Il fait ensuite sa première apparition chez celui
qui deviendra l’un de ses réalisateurs fétiches, mais également
un ami, en l’occurrence Herman
Yau, le film, une comédie Andy
Lau et Tony Leung Chiu-Wai.
La même année, il apparaît dans Casino
Raiders 2, un film de commande signé par un autre grand
de l’ex-colonie,
Johnnie To. A
noter sa première incursion dans l’un de ses genres de prédilection
la même année 1991, la catégorie
3 avec un Erotic
Ghost Story 2 signé par l’acteur réalisateur Peter
Ngor.
Déjà sa présence crève l’écran faisant parfois de l’ombre
au premier rôle. C’est dans
cette logique
de consécration qu’en
1992 il obtient une
nommination aux HK Awards de meilleur second rôle pour Now
You See Love… Now You Don’t de
Alex Law. Dès lors, aucune de ses apparitions ne passera inaperçues.
Souvenons nous de ses apparitions dans des rôles plus ou moins
important comme le très noir Full
Contact de Ringo Lam, dans lequel il interprète le rôle
de Sam, l’ami trahissant Chow Yun-fat
ou dans Hard Boiled
de John Woo.
La
consécration
L’année
1993 est l’année de la véritable consécration, il obtient
l’HK Award du meilleur acteur pour son rôle de psychopathe
dans The
Untold Story de Herman
Yau. La même année il interprète le rôle de "Dinosaur"
dans le
film d’action à l’eau de rose de Benny Chan A
Moment Of Romance 2 (véritable film-culte chez certains
cinéphiles). La même année il apparaît dans Heroic
Trio de Johnnie
To, il joue le tueur de chauffeurs de taxi vengeur dans
le non moins culte Taxi
Hunter et le rôle du policier de service dans le très
« hard » Daughter
Of Darkness, véritable sommet de mauvais goût…
Son incroyable faculté à se mouvoir dans tous les genres lui
permet d’apparaître dans tous les genres, on le voit ainsi
dans le film de kung fu fantaisiste chez Johnnie
To The Mad Monk,
dans la comédie non-sensique aux côtés de Stephen
Chow Figt Back To School 3 de Wong
Jing ou le thriller destroy ultra-violent The
Underground Banker de Bosco Lam.
Kirk Wong
En
1994, Kirk Wong lui donne le rôle du bandit au grand cœur Tung
dans le génial O.C.T.B.
sa présence à l’écran foudroie toute perspective, et il apparaît
comme le véritable héros du film malgré un rôle de prétendu méchant.
Sa collaboration avec Kirk Wong n’en restera pas là, car il enchaînera
avec son rôle de flic « cool » qui frappe dur dans le
trop souvent mésestimé Rock’n
Roll Cop.
Le
passage à l’acte
Désormais, Anthony Wong est un acteur important, il interprète
des premiers rôles. En 1995, avec l’aide du réalisateur Tony
Leung Hung-Wah (A Lamb In Despair) il réalise son premier film, il s’agit d’un drame
tendance polar classé catégorie
3, à noter que la BO composé par Anthony Wong himself,
s’avère un véritable morceau de trash-punk-destroy. Après
un passage chez Andrew « ils sont beaux
mes navets » Lau dans le très « propagandiste »
Young And Dangerous
2, il revient à la mise en scène avec Top Banana Club, une comédie romantique assez poussive.
1996
L’année du syndrôme
Il
y a des rôles qui marque la carrière d’un acteur pour des
raisons pas toujours « glorieuses », souvenons-nous du
Marlon Brando du Dernier Tango
A Paris de Bertolucci et sa plaquette de beurre… Anthony Wong,
qui par son incroyable faculté à sa glisser dans toutes les peaux
et sa totale désinvolture quant aux
conséquences que certains de ses rôles peuvent donner à son image
de marque, n’hésite pas un instant à interpréter le rôle
d’un taré complètement dégénéré, il s’agit de son rôle de
dément atteint d’un virus dans le très trash Ebola
Syndrome. Après avoir fait un véritable massacre à Hong-Kong,
il décide de se tirer en Afrique pour refaire sa vie… hum…
que
ne trouve-t’il pas de mieux à faire à son arrivée sur les lieux ?
… de violer une femme à demi-morte atteinte du virus Ebola ! ! !
Alors commence une incalculable somme de scènes trash complètement
immorales. Et de se masturber
à l’aide d’une entrecôte ( !) et de se mettre à cracher
sur tout le monde pour refiler
sa maladie ( ! ! !)… et ainsi de suite… Autant le
dire, ce film bafoue toute morale et ce avec une certaine atteinte
du but recherché.
Sa carrière n’en continue pas moins, alors passons sur ses
apparitions dans des navets comme Young
And Dangerous 3 ou Armageddon,
pour l’apprécier dans des rôles comme celui de King Hau dans
Black Mask ou dans le Viva
Erotica de Derek Yee.
The number of the Beast
En 1998, Gordon Chan, aidé par Dante Lam réalise le polar noir Beast
Cops, dans lequel le bon Anthony, interprète le rôle d’un
flic ripoux capable de péter les plombs aux côtés de « l’autre »
gweilo au même patronyme, en l’occurrence Michael Wong. Son rôle
de flic névrosé lui vaudra d’ailleurs un rôle de « meilleur
acteur » aux HK Awards. Il réussit un véritable numéro dans
un film oscillant entre étude de mœurs et polar brut. Il apporte
d’ailleurs le petit plus à ce film qui est tout de même loin
d’atteindre des sommets.
La même année il apparaît dans le The
Group de l’ami Alfred Cheung et dans la comédie Mr
Wai-Go du très inégal Aman Chang. Passons sur son apparition
dans le wu xia pian frimeur d’Andrew Lau Storm
Riders.
1999 : Ann Hui, The Mission et quelques légumes…
L’année
1999 commence plutôt légèrement avec Century
Of The Dragon de Clarence Ford et The
Kingdom Of Mob un film de triades
du spécialiste de la catégorie
3 Ivan Lai (Daughter
Of Darkness) .
C’est alors que Johnnie
To lui propose le rôle de Curtis, le chef de la bande
des cinq formée de Roy, Shin, Mike et James dans l’excellent
The Mission, un véritable bijoux de mise en scène, ou science de l’immobilisme
et fulgurance des scènes d’action se côtoient avec une incroyable
réussite. Inutile de parler plus de ce film que tous fans
se doit d’avoir vu et qui représente le sommet de la carrière
de son réalisateur. Une œuvre inévitable qui je pense prendra
encore plus de valeur avec le temps…
Après
une escapade dans la catégorie
3 dans le Raped
By An Angel 4 de Wong
Jing, Deadly Camp
de Bowie Lau et Erotic
Nightmare de Steve Cheng, il passe à la classe supérieure
en interprètant le rôle du père Kam, un prêtre italien ( !)
dans le film miltant
d’Ann Hui Ordinary Heroes,
il obtient encore une nomination à l’HK Awards pour ce film
d’auteur à mi chemin entre fiction et documentaire parlant
du combat d’un groupe d’activistes dans les années 80 pour
obtenir un meilleur staut pour les pêcheurs.
Il enchaîne ensuite avec un rôle de reporter dans Lamb In Despair de Tony Leung Hung-Wah, une catégorie
3 avec son tueur en série à grosses lunettes plutôt bien
troussée (la catégorie
3 J).
Il croise Andrew Lau sur A
Man Called Hero et fait une courte apparition dans Metade
Fumaca de Riley Yip.
Le
nouveau siècle
Le nouveau siècle commence avec un Fist
Power de sinistre mémoire, et s’enchaîne alors toute une flopée
de produits
plus ou moins intéressants. Il tente de renouer avec le succès de Beast
Cops dans un navet du mauvais Steve Cheng avec Violent
Cop, il joue le rôle d’un flic dans le sympathique Baroness
aux côtés de Chin Kar-Lok et joue dans toute une série de
films d’épouvante post Ring plus ou moins mauvais. Son rôle
anecdotique de Docteur Tang dans Gen-Y
Cops est l’un des seuls intérêts de ce film de djeun’s à
la mèche.
Dans
l’interview qu’il accordait à David Martinez, il disait vouloir
un jour jouer dans un film de Tsui
Hark, ce sera chose faîte avec son rôle d’Uncle Ji dans
le Time And Tide.
Il apparaît dans le rôle mémorable et furtif de Master Kwan dans
ce que je considère comme l’un des meilleurs films des années
2000 en l’occurrence Jiang-Hu
The Triad Zone d’un
Dante Lam au meilleur de sa forme. Il remettra le couvert avec ce réalisateur
l’année suivante dans
le marrant Runaway dans un
rôle de chef de triades dépressif.
Depuis très peu de rôle réellement marquant pour lui, ne
serait-ce qu’un rôle secondaire dans le Princess
D de l’actrice Sylvia Chang, un rôle solide dans l’Infernal
Affairs d’Andrew Lau et surtout Alan Mak et le rôle de Hung
dans Demi-Haunted de
Patrick Leung.
Son
prochain film est réalisé par Gordon Chan, son titre Cat And Mouse, il y interprète le rôle d’un juge.
Nominations
et prix divers :
1992 – Nomination pour le meilleur second rôle
masculin aux HK Awards
pour Now You See Love, Now You Don’t d’Alex Law
1993 – HK Award du meilleur acteur pour
The
Untold Story
de Herman
Yau
1996 – Nomination pour le meilleur second rôle
masculin aux HK Awards pour Young
And Dangerous d’Andrew Lau
1998 – HK Award du meilleur acteur pour Beast Cops de Gordon Chan et Dante Lam
1999 – Nomination pour le HK Award du
meilleur acteur pour Ordinary
Heroes d’Ann Hui
2002 – Nominations meilleurs second rôle
masculin aux HK Awards pour Infernal
Affairs d’Andrew Lau et Alan Mak, pour Princess
D de Sylvia Chang et pour Just
One Look de Riley
Yip.
A
lire aussi : le portrait d'Anthony Wong par Master Cyco
Philippe,
Février 2003
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