De
son nom mandarin, Chu Yuan est connu pour avoir réalisé
plusieurs wu xia pian dont The
Magic Blade et la série des Sentimental
Swordsman avec Ti
Lung, mais avant cela il compta une soixantaine de réalisations
! ! ! dans le domaine du film romantique, de la comédie
et du film d’action. Il est également connu en tant
qu’acteur, le méchant dans Police Story, c’est
lui et pour avoir réalisé l’une des meilleures
comédies de la Film Workshop, l’excellent Diary
Of A Big Man avec Chow
Yun Fat et Joey Wong.
Né
en 1934 dans la province de Canton d’un père comédien,
il étudie d’abord la chimie, mais se passionne vite
pour le cinéma et devient scénariste puis assistant
réalisateur. En 1956, il écrit le script du
film The Soul Stealer pour le réalisateur
Ng Wui. L’année suivante il passe à la mise
en scène en co-réalisant Bloodshed In The
Valley of Love avec le vétéran Chin Chien.
A cette époque, la star number one est sans conteste
Patrick Tse Yin, une sorte de Rudolph Valentino chinois qui
fait craquer les dames (il fera un come back retentissant
en 2001 en devenant le diabolique manager de foot de la "Evil
Team" dans Shaolin Soccer et il est en outre
le père de la star des teenagers Nicholas Tse). En
1959, Chor Yuen réalise son premier film seul, il s’agit
d’un mélo à l’eau de rose avec le même
acteur précité, son titre Grass By The Lake.
Par la suite Chor Yuen réalisera une soixantaine de
films de ce genre avec la star du moment, dont les titres
sont souvent très démonstratifs : True Love,
My Only Love, Forever Beloved… Très
attiré par les intrigues policières il réalisera
en 1965 Black Rose avec le même Patrick Tse
Yin et l’actrice Connie Chan. Après avoir fait se succéder
romance et films policiers pendant plus de dix ans, il réalise
en 1970 le wu xia pian Cold Blade. En 1972, il met
en scène le très moyen The Killer (tiens
! ! !) avec Chin Han et Wang Ping qui a la particularité
d’avoir été édité en vidéo
en France sous le titre de L’œil Du Dragon. La même
année il réalise une très «chaude»
romance avec Lily Ho
dont le titre est très démonstratif, Intimate
Confessions Of A Chinese Courtesan, ce film montrera
les premiers fragments du saphisme si présent dans
les films d’épées féminins. La célèbre
maison de production Cathay commence sérieusement à
battre de l’aile et une célèbre concurrente
fait parler d’elle, il s’agit de la maison de productions
des frères Shaw, dont le nom est très justement
amené, la Shaw Brothers. Chor Yuen ne tarde pas à
rentrer dans les rangs de la célèbre firme et
il rejoint le Movieland. Chor Yuen réalisera une comédie
avec Yueh Hua qui
aura la particularité de battre Bruce Lee au box-office,
son titre House Of 72 Tenants, le remake d’un vieux
mélodrame mandarin. Mais c’est dans le wu xia pian
que Chor Yuen réussira ses plus beaux fleurons.
En 1976, il réalise Killer Clans qui a la
particularité de rassembler des futures stars comme
Danny Lee et Norman
Chu (à noter que ce film fera partie de la première
fournée des dvds tant attendus de la Celestial Picture).
La même année il réalise son film le plus
célèbre, le très attendu (en dvd) The
Magic Blade, qui impose Ti
Lung dans le rôle d’un épéiste solitaire,
rôle que l’acteur reprendra à plusieurs reprises,
notamment dans la série des Sentimental Swordsman.
Contrairement à un Chang
Cheh par exemple qui a toujours imposé un style
réaliste à ses films, Chor Yuen apporte une
ambiance à la limite du fantastique, de plus les intrigues
à tiroirs et le sens irrationnel de son œuvre en font
peut-être le pilier d’un genre qui par la suite fera
bien des émules dans l’ex-colonie. Citons ainsi un
réalisateur comme Ching
Siu-tung par exemple qui s’inspirera fortement de ce style
notamment le côté saphique d’une œuvre comme
Intimate Confessions… que l’on retrouvera dans la
filmographie de ce dernier avec des films comme A Chinese
Ghost Story (Histoires de fantômes chinois)
et East Is Red /Swordsman 3.
Après
avoir réalisé toute une flopée de wu
xia pian fantastiques, il réalisera en 1980 The
Convict Killer (Griffes d’Acier contre Leopard Noir)
toujours avec Ti
Lung. En 1981, il réalisera un excellent Return
Of The Sentimental Swordsman avec toujours Ti
Lung dans le rôle titre et Alexander
Fu Sheng, suivi d’un Perils Of The sentimental Swordsman
qui marquera la fin de cette série. Chor Yuen reviendra
par deux fois au film de sabre, avec The Roving Swordsman
en 1983 toujours avec Ti
Lung, puis en 1984 avec The Hidden Power Of The Dragon
Sabre qui mélange film de sabre et horreur, ce
film sera d’ailleurs l’objet d’une série télévisée.
En
1983, Chor Yuen aura réalisé un Mad, Mad
83 qui aura la particularité d’avoir lancé
l’acteur Tony Leung
Chiu-wai. En 1986 il réalise une excellente comédie
romantique avec Leslie
Cheung et Anita Mui intitulée Last Song In
Paris. C’est cette prédisposition du réalisateur
à fignoler des comédies sentimentales à
la Black Edwards, qui donnera l’idée à Tsui
Hark de faire appel à lui pour réaliser
Diary Of A Big Man qui demeure à ce jour l’une
des meilleures comédies romantiques hongkongaises,
où on peut y voir Chow
Yun Fat en homme à femmes croiser avec une grande
réussite des actrices comme Joey Wong et Sally Yeh
dans un joyeux méli-mélo. En 1990 le vétéran
réalise un polar avec Alex Fong et Waise Lee, son titre
: Blood Stained Tradewind, qui a la particularité
d’être produit par l’acteur Chen
Kuan Tai. En 1992 il réalisera son dernier film
Mad Mad 1997 qui est une suite du premier film avec
Tony Leung Chiu-wai,
mais cette fois-ci l’acteur y tient un rôle plus important
aux côtés d’Anita Mui.
Entre
temps le réalisateur aura également été
acteur, notamment chez Jackie
Chan, la série des Police Story, mais
également Mister Canton & Lady Rose (Big
Brother) et dans des films comme Twin Dragons,
Thunderbolt ou Those Were The Days . Dernièrement
il est réapparu chez Joe Ma dans la comédie
Dummy Mommy, Without A Baby.
Mais
ce qui restera la grande force de ce réalisateur trop
souvent ignoré, c’est cette faculté d’avoir
apporté une vision fantastique au film de sabre, une
touche résolument esthétisante et un sens pointilleux
de l’intrigue qui donnera à disserter aux cinéastes
hongkongais dans le registre du film d’heroic-fantasy. Une
manière comme une autre de contredire le penchant ultra-réaliste
des oeuvres de Chang
Cheh.
Philippe
(novembre 2002)